Gag par lui-même
En 1962, Francis Gag s'est vu remettre par "Lou mesclun, Foyer des amitiés niçoises à Paris" le cougourdon d'honneur, distinction reçue avant lui par Pierre Rocher, Raoul Audibert, Somerset Maugham et Paul Montel. Dans une lettre en réponse à Paul Gordeaux, alors Président de "Lou mesclun", Francis Gag se voit contraint de parler de lui-même :
Mon cher Gordeaux,
Puisque c'est à vous qu'échoit le rôle ingrat de présentateur cougourdonnier, je vous adresse par ce même courrier, un semblant de documentation sur mon "oeuvre" arraché à l'invraisemblable fouillis d'archives amoncelées, depuis quarante ans, sur un coin d'étagère.
C'est en effet en 1922 que je créai "Le Nouvé" de Mossa et Marengo à la Salle Jeanne d'Arc.
Par la suite, et ceci durant vingt-cinq ans, mon existence fut partagée entre ma tâche d'artisan-teinturier et ma passion pour le théâtre dialectal, et même de théâtre tout court, puisque durant la guerre de 40, j'utilisais mes loisirs de Sapeur du 7ème Génie à créer, de toutes pièces, un Théâtre aux armées qui se produisit dans tous les Forts des Alpes.
C'est en 1945 que TANTE VICTORINE est entrée dans ma vie (Elle y est d'ailleurs toujours et me dévorerait volontiers si je me laissais faire!). La réussite de ce personnage à la radio et sur la scène m'a permis d'abandonner mon métier pour me consacrer, uniquement, au rêve que je poursuivais depuis toujours. Au personnage de Victorine, j'ai ajouté, par la suite, celui de son mari Titoun, puis, Barbarin de Ribassière, leur cousin de l'arrière-pays niçois et enfin, Monsieur Guigonnet, un ami de Provence. Peut-être convient-il de préciser que j'interprête les trois rôles en dehors de celui de Titoun, dans le "PASTROUIL DE TANTE VICTORINE" qui tient le micro depuis dix-sept ans, sans interruption. Pour le compte de Radio Monte-Carlo, toujours, - j'en suis à la deux-centième - je présente une émission régulière sur "Les contes et les légendes du Pays bleu".
Je réalise, également, pour les auditeurs de la Radio-télévision française - et ceci depuis plusieurs années - des reportages hebdomadaires sur les villes et les villages de l'arrière-pays.
Entre temps, à la demande de Monsieur Jean Médecin, j'ai fondé le Groupe de NICE LA BELLE dont la conduite est loin d'être une sinécure. Accaparé par ces multiples tâches, je n'ai plus trouvé le temps d'écrire pour le THEATRE NICOIS, et je suis le premier à le déplorer. J'ai toutefois bon espoir - si Dieu me prête vie - et si l'inspiration me visite de bâtir une MARCHE A LA CRECHE dont je me dis le plus grand bien : Cride-lou ti denan que lou ti digon !
Pour témoigner de cet ensemble d'occupations dont vous avez jugé au MESCLUN que cela valait d'être signalé, j'ai choisi, à la diable, quelques articles extraits de conférences et autres textes parus de-ci de-là, en souhaitant qu'un passage saisi au hasard fournisse matière à votre laïus qui, pour si bref qu'il soit, portera pour moi la marque d'une attention amicale dont je vous sais gré.
Nous serons à Paris, ma femme et moi dès le 2 décembre et me permettrai de vous téléphoner afin de prendre rendez-vous avec vous, si vous le jugez bon, pour un entretien de quelques instants.
L'essentiel étant dit, je vous prie de me pardonner pour ce temps précieux que je vous ai pris et de me rappeler au bon souvenir de la souriante Madame Gordeaux.